L'anticapitalisme ou la nécessaire réappropriation du marxisme
Le
NPA a six mois et déjà une riche expérience. Fondé au cœur
des grandes mobilisations des premiers mois de l’année 2009,
première vague de riposte face à la crise globale du
capitalisme, il a immédiatement été confronté à des
questions essentielles : quelle politique unitaire, liens
entre les mobilisations et les élections, quelle politique
dans les syndicats, liens entre parti et syndicat… Autant de
questions qui sont au cœur des luttes de classes et de la
politique du mouvement ouvrier. A travers ces expériences
commence à se forger une conscience commune, à travers aussi
les discussions tant sur les bilans que sur la préparation
des nouvelles échéances sociales et politiques. L’enjeu de
ces discussions, aussi bien internes qu’avec les autres
forces de la gauche radicale et révolutionnaire, est de
renforcer notre parti, renforcer sa cohérence politique pour
en faire un réel instrument efficace des luttes
d’émancipation, un instrument pour les travailleurs et les
classes populaires.
Répondre à ces nouveaux besoins
nécessite une méthode, démocratique au sens où elle ne
craint aucun débat, révolutionnaire au sens où elle vise à
créer une conscience collective en rupture radicale avec
l’ordre établi. Cette méthode, c’est le marxisme.
Mais cette méthode elle-même
n’est pas acquise, elle a été caricaturée, déformée,
trahie, il nous faut nous la réapproprier en lui redonnant
sa force émancipatrice, sa modernité contestatrice face à
ceux qui l’on réduite à des formules, des références, des
dogmes.
Le processus même du NPA
participe pour ceux qui en son sein se revendiquent du
marxisme d’une double démarche : la constitution d’un
cadre large et ouvert aux jeunes générations rejoignant le
combat politique comme aux moins jeunes aux histoires et
aux traditions différentes, pour agir, discuter, formuler
une politique et, dans le même temps, la nécessaire
réappropriation collective du marxisme pour donner une
base solide à ce parti, une base programmatique comme une
base sociale au sein du monde du travail.
De ce point de vue, il y a une
contradiction au cœur même de la fondation du NPA au sens
où cette référence n’est pas explicite dans ses textes
fondateurs et laisse la place à une formule imprécise,
« retenir le
meilleur de l’histoire du mouvement ouvrier ».
D’où vient cette contradiction,
comment la dépasser ?
Une
étape incontournable
De fait l’étape actuelle était,
quant au fond, nécessaire à cause des divisions et des
échecs du mouvement révolutionnaire et de la crise des
organisations issues de la longue période du mouvement
ouvrier ouverte par la Révolution russe de 1917. Il n’y
avait pas d’autre voie pour engager la construction d’un
nouveau parti que d’accepter de se fondre dans un cadre
large et ouvert respectant les différentes histoires et
héritages politiques des uns et des autres, rompant avec
les habitudes des groupes issus de la période d’après 68.
Il fallait oser nous engager
dans un processus qui rompe avec notre propre histoire
pour mieux en retrouver, en écrire la continuité à travers
le débat démocratique avec tous celles et ceux qui ont
fait du projet de transformation révolutionnaire de la
société leur propre projet, d’où qu’ils viennent.
Nous ne sommes pas des
doctrinaires qui rejettent ou condamnent la réalité si
elle ne correspond pas à leurs anciens schémas. Le cours
de l’histoire n’est pas linéaire et connaît des chemins
complexes…
Cette étape était nécessaire à
condition bien sûr que les principes fondateurs du nouveau
parti définissent une démarche qui non seulement ne soit
pas contradictoire avec une démarche marxiste mais la
reprenne pour l’essentiel : critique radicale du
capitalisme dont les contradictions sont grosses d’une
nouvelle société, le socialisme, pour définir une
politique transitoire posant la question du pouvoir et la
nécessité d’un parti comme instrument de cette
transformation révolutionnaire.
Cette situation renvoie à une
faiblesse du courant marxiste dans sa diversité : aucune
des différentes tendances du marxisme n’a été capable de
devenir elle-même un cadre politique permettant d’engager
la bataille pour un véritable parti anticapitaliste et
révolutionnaire réellement lié aux masses répondant aux
besoins et aux possibilités de la nouvelle période.
Façonnées par la période aujourd’hui close où dominait le
stalinisme, les différentes organisations n’ont pu ou ne
pouvaient accomplir par elles-mêmes le saut qualitatif
nécessaire sans accepter de se dissoudre dans un cadre
plus large. Le grand mérite de la Ligue est d’avoir osé.
Le premier pas réalisé, loin de
chercher à reconstruire, sous une forme ou sous une autre,
les vieilles tendances, il s’agit de discuter, de répondre
à de nouvelles questions à travers les débats collectifs
du parti. Cela suppose que nous sachions à la fois prendre
notre place dans le travail collectif à tous les niveaux
de responsabilité tout en nous donnant les moyens
d’élaborer et d’exprimer nos propres appréciations, voire
divergences, sans en faire pour autant des points de
clivage. Faire fructifier notre capital politique tout en
construisant des cadres larges de regroupement.
Une
fraction marxiste ?
Certains camarades pensent que
la constitution d’une fraction révolutionnaire au sein du
parti était nécessaire de la même façon que d’autres
pensaient que les militants de la IV auraient dû se
regrouper en association-fraction.
C’est aussi la discussion avec
nos camarades anglais du SWP, voir les articles d’Alex
Callinicos et de François Sabado dans Critique
communiste n°189.
Alex Callinicos y pointe du doigt notre contradiction et
souligne l’effort « considérable
pour former dans la tradition marxiste révolutionnaire les
nouveaux militants gagnés au NPA ».
Effort qui à lui seul nécessiterait la constitution d’une
tendance. Le problème est bien réel Il renvoie à la
compréhension même que nous avons du marxisme ainsi que
des causes qui ont engendré une telle situation.
La démarche qui a prévalu pour
les camarades qui animent Débat
révolutionnaire a
été de s’insérer dans le processus en cherchantà chaque étape à dégager
l’essentiel qui regroupe et unit sur des bases
anticapitalistes pour, dans le même temps, travailler à
faire avancer la conscience collective du parti à travers
sa propre expérience, en nous incluant bien sûr dans ces
évolutions
Cette démarche est aussi une
méthode de travail pour rompre avec une conception
dogmatique du marxisme qui paralyse ou écarte.
La tradition marxiste qu’évoque
Callinicos renvoie à une période qui est close, celle
ouverte par la révolution russe. Les problèmes se posent
en d’autres termes, l’objet de notre discussion est de les
définir en gardant un regard critique sur nous-mêmes.
L’analyse des causes de l’échec
des courants trotskystes à se transformer en courant de
masse est nécessaire pour tenter de définir les objectifs
de notre travail actuel : il y a les conditions
objectives, le recul du mouvement ouvrier, mais
parallèlement aussi les conceptions héritées de ce passé,
les habitudes militantes, une compréhension par trop
formelle du parti, de sa construction, de l’usage des
références historiques souvent transformées en recettes…
On ne voit pas comment un si
long recul historique n’imposerait pas, face à une
nouvelle période, une véritable renaissance du marxisme.
Il y a un constat d’échec de
l’extrême-gauche trotskyste, marxiste, à devenir de
réelles organisations de masse et cela alors même que les
conditions historiques qui ont prévalu à notre isolement
par rapport à la classe ouvrière ont disparu.
On ne peut se contenter
d’invoquer ces conditions objectives, le recul, comme le
fait LO pour masquer son propre échec.
Mais une autre erreur serait de
croire que le NPA pourrait réaliser ses objectifs, devenir
un parti de transformation révolutionnaire de la société,
sans se réapproprier collectivement les idées du
matérialisme militant.
Ce serait évacuer nos propres
responsabilités dans les échecs passés, abandonner tout
esprit critique pour tomber dans un éclectisme sans
boussole ni colonne vertébrale. Bien au contraire, nous
devons passer au crible de la critique nos propres
conceptions et raisonnements pour nous réapproprier la
méthode marxiste afin d’être en mesure d’apporter les
réponses aux questions que pose au mouvement ouvrier la
crise globale et mondialisée de la domination des classes
bourgeoises.
La
théorie vivante des luttes d’émancipation
Le marxisme n’est pas un dogme
ou une série de références programmatiques conçues comme
autant de points de délimitations sur les textes
« historiques ». Le marxisme est la théorie vivante des
luttes d’émancipation, une méthode pour analyser, penser
les conditions mêmes de la lutte, agir.
Du fait de la domination du
stalinisme, le marxisme révolutionnaire est longtemps
resté trop souvent extérieur à la classe ouvrière. Ses
militants ont pris l’habitude de penser en conseilleurs,
en dénonciateurs des trahisons, en gardiens du temple
d’une orthodoxie autoproclamée et cela jusqu’à la
caricature ou alors, bien souvent, ont trouvé leur place
au sein des appareils.
Personne n’a pu y échapper,
c’est un fait historique qui vérifie à quel point les
idées ne peuvent s’élever au dessus de l’activité pratique
du mouvement réel.
Pour les marxistes eux-mêmes,
militer dans un parti large, intégrant d’autres
traditions, d’autres courants, d’autres histoires, est un
besoin, une étape de fait indispensable pour sortir des
réponses dogmatiques et reformuler leurs idées.
La nouvelle période dans
laquelle le monde est entré contraint chacun à un retour
critique sur lui-même dans le même temps qu’elle crée les
conditions d’une renaissance du marxisme comme théorie
révolutionnaire.
Si on schématise la façon dont
le marxisme est perçu aujourd’hui, on peut noter deux
points de vue : l’hommage au Marx du Capital
dont les analyses
du capitalisme prouvent la pertinence, opposé au marxisme
après Marx, pêle-mêle, Lénine, Trosky, Staline, Mao… Marx
disqualifié en tant que penseur des luttes d’émancipation.
C’est bien à laconception
du marxisme comme théorie et pratique des luttes
d’émancipation à laquelle il s’agit de redonner sa force
créatrice, subversive.
Comme le proposaient Marx et
Engels dans L’idéologie
allemande, il faut
appeler « communisme
le mouvement réel qui abolit l'ordre actuel », c’est ce mouvement réel
qu’il s’agit de comprendre, de décrire, d’anticiper pour
œuvrer à ce que les opprimés deviennent eux-mêmes acteurs
dans ce mouvement réel…
Cela
implique d’oublier les conclusions issues de la période
antérieure pour mieux les actualiser dans le nouveau
contexte historique dans lequel nous agissons. Vaste travail
qui a comme cadre naturel celui du parti, de ses débats en
fonction des besoins de sa propre activité comme des
discussions avec les autres courants qui se revendiquent du
mouvement ouvrier, de la gauche radicale. La conception
marxiste, loin de s’affirmer de façon négative, conquiert
les esprits par sa capacité d’analyse, sa capacité à donner
une expression commune aux mille et une révoltes que
provoque la crise chronique de la domination de la classe
capitaliste, en conséquence, par sa capacité, pour
paraphraser Marx, à représenter en permanence les intérêts
généraux du mouvement.
La
place du NPA dans l’histoire du mouvement ouvrier
La tâche ambitieuse à laquelle
nous voulons participer résulte du sens même de la
fondation du NPA comme une réponse à la crise du mouvement
ouvrier, de la place qu’il prend du point de vue de
l’évolution de ce dernier.
Il
est l’aboutissement des évolutions accomplies depuis le
début des années 90, suite à l’effondrement du stalinisme
dans le cadre de l’offensive libérale et impérialiste, pour
être, à peine né, confronté au brutal basculement du monde
dans la crise endémique de la domination des classes
bourgeoises. Cette place dans l’histoire de la fondation du
NPA, les caractéristiques de la période définissent nos
tâches, la mue politique que le courant marxiste a à
accomplir. La lutte politique, ses objectifs ne se
définissent pas en fonction de simples buts immédiats
électoraux ou revendicatifs mais bien par rapport à
l'histoire des luttes d’émancipation en lien avec le
développement du capitalisme dans la perspective du
socialisme. Celle-ci n’est pas une proclamation de foi, un
but idéal, elle est inscrite dans la marche réelle de
l’humanité.
De là découle une vision
stratégique du processus de construction du NPA qui
associe défense et illustration du marxisme à travers le
processus de construction d’un nouveau parti, des luttes
de classe dans le développement même de la crise du
capitalisme, combinées à une politique d’alliances, de
front unique, de regroupement, de discussions publiques et
larges. C’est ainsi que le NPA pourra se constituer en
parti de transformation révolutionnaire, instrument des
luttes et de l’auto-organisation des exploités.
De fait, à peine né, le NPA,
enfant des évolutions accomplies ces dix dernières années,
doit vigoureusement s’affirmer, conquérir son
influence dans les premières tempêtes de la crise.
S’approprier
le meilleur de l’histoire du mouvement ouvrier, une
formule ou une politique
L’objectif
d’offrir un cadre militant ouvert à tous les
anticapitalistes impliquait d’intégrer dans nos
raisonnements les différentes histoires et traditions. C’est
la fonction de la formule s’approprier le meilleur de
l’histoire du mouvement ouvrier. Par delà cette première
fonction, la formule définit une politique qui vise à
s’approprier toutes les expériences dans leurs richesses et
leurs diversités par delà les références idéologiques des
acteurs eux-mêmes. Il ne s’agit pas de s’adapter passivement
à un éclectisme, ce qui aboutirait nécessairement à des
divisions, mais bien de travailler à un processus de fusion,
d’intégration des différentes expériences à travers lequel
pourra se forger une pensée collective. Le NPA n'est-il pas
une sorte de melting-pot politique au sein duquel se forge
une nouvelle conscience ?
Il ne s'agit pas uniquement
d'un travail universitaire ou de formation même si
celle-ci est indispensable mais bien d'un travail pratique
et concret directement liée à la lutte de classe réelle,
telle qu’elle se déroule, à l’intervention des militants
ouvriers et qui intègre dans un même mouvement travail
d’élaboration, intervention concrète, pratique, militante.
Chaque comité participe à son
niveau à cette tâche, lieu de formation par les
discussions d’actualité, les choix d’orientation dans nos
différentes interventions, en aidant chacune et chacun à
s’approprier une culture marxiste.
C’est à travers ce travail, au
rythme du développement réel du mouvement que pourra être
redéfini le contenu de la révolution à venir, de la
démarche transitoire, de la question du pouvoir, de la
destruction de l’État bourgeois… Le contenu moderne que
l’on peut donner à ces notions ne peut se trouver dans les
seuls cerveaux des révolutionnaires sans relation avec
l’activité de la classe ouvrière. En son temps, Marx
n’a-t-il pas trouvé l’idée de l’État commune dans
l’expérience même de la lutte, celle de la Commune de
1971 ?
L'ensemble de ce travail est
sous-tendu par l’analyse et la compréhension de la crise,
de sa spécificité, de son évolution, de ses implications
pour le mouvement ouvrier, son programme, ses luttes.
L'occasion de réintroduire dans les analyses économiques
la lutte de classe, la critique de la politique de la
classe dominante.
Loin
du sectarisme, porter les intérêts généraux du mouvement
La
crise que traverse le monde n’est pas seulement celle de la
domination des classes capitalistes, elle exprime aussi un
recul profond des rapports de force et entraîne une remise
en cause des idées et des conceptions héritées de la période
antérieure. La crise des vieux partis issus de cette période
appelle une politique capable d’offrir une perspective aux
travailleurs désorientés, à la jeunesse. Cette politique ne
saurait se contenter d’une simple défense de notre
programme, l’affirmation de la continuité du combat pour le
socialisme et le communisme. Elle doit répondre aux
aspirations unitaires, mener publiquement le débat avec les
autres forces dans le but de contribuer au regroupement des
forces qui veulent rompre avec le capitalisme, de tous
celles et ceux qui, eux aussi, entendent assumer la
continuité du combat pour le socialisme, le communisme.
L’effondrement des partis de l’ancienne Union de la gauche,
le PS et le PC, rend cette politique unitaire d’autant plus
indispensable.
Pour la première fois depuis
longtemps, le courant révolutionnaire est en mesure de
formuler et de mettre en œuvre, par lui-même, une
politique de front unique.
Un parti ne se construit pas
uniquement par auto-affirmation mais à travers une
politique qui combine nécessairement politique de front
unique et défense de ses propres positions. Le débat avec
les autres forces suppose une politique à leur égard qui
ne relève pas de la simple dénonciation ou critique.
Comment la mener ? Comment articuler discussion autour des
perspectives générales et action unitaires pratiques,
comme en définir le cadre commun, quel compromis ?...
Autant de questions ouvertes qui ne connaissent pas de
réponses toutes faites.
Le
marxisme comme instrument d’organisation sur les lieux de
travail
L'ensemble de ce travail ne
prend son sens que par rapport à la lutte de classe réelle
et, donc, par rapports aux possibilités de la classe
ouvrière d'y jouer un rôle, d'y intervenir avec sa propre
politique. Croire que tout se déduit de la théorie, du
simple débat d’idées sans rapport avec une activité
pratique et concrète dans la lutte de classe ne
relève-t-il pas d’une conception idéaliste ?
Répondre aux besoins de la
classe ouvrière, de ses luttes définit l'axe du travail
des marxistes. Ne se contente-t-on pas trop de discuter de
l'intervention dans la classe ouvrière au lieu de discuter
de l'intervention de la classe ouvrière ?
Tout notre travail politique
participe de la formation d’une conscience de classe à
partir d’une claire compréhension de la politique de
l’adversaire en la décrivant à partir de l’expérience des
plus larges masses. Le parti n'est-il pas, en dernière
analyse, l’expression organisée de cette conscience ?
Au cœur de cette activité, se
trouve la question pratique de l’activité syndicale, de
notre politique par rapport aux bureaucraties, les
rapports entre parti politique et syndicat. Ces questions
sont éminemment pratiques et doivent être abordées d’un
point de vue pragmatique en libérant les cerveaux des
débats passés focalisés par la subordination de la CGT à
l’appareil stalinien.
Le NPA n’est pas un
supersyndicat mais bien un parti de transformation
révolutionnaire, instrument pour les luttes d’aujourd’hui
et de la lutte pour le pouvoir demain, un parti dont les
militants, partout où ils agissent, défendent la même
politique, la soumettent à la discussion démocratiquement.
La discussion sur les débats
tactiques suppose de s’affranchir de ces derniers pour
assumer notre propre politique de parti des luttes, dont
les militants défendent les orientations, les
revendications là où ils militent, dans les organisations
syndicales en mettant en avant la nécessité de
l’auto-organisation
La
démocratie au cœur de la philosophie marxiste
Là est bien le fond de la
question, l’émancipation des travailleurs par eux-mêmes,
et le marxisme est un instrument pour analyser l’évolution
des conditions objectives pour mettre en exergue tout ce
qui renforce la classe ouvrière, lui donne les moyens de
son émancipation, pour agir afin de favoriser l’émergence
d’une conscience révolutionnaire, c'est-à-dire la
conscience que les intérêts des classes populaires, de
l’humanité elle-même, sont incompatibles avec la
domination de la bourgeoisie, de la propriété privée.
Travailler à une renaissance du
marxisme, c’est redonner sa place à la démocratie au cœur
même du processus révolutionnaire, le socialisme par en
bas, une démocratie révolutionnaire, l'intervention
directe des travailleurs, des classes populaires sur le
terrain où se décide leur propre sort, la lutte contre la
bureaucratie en renforçant l’activité même des masses.
La
réappropriation du marxisme passe par un point essentiel, la
rupture avec les conceptions du parti « par en haut »,
parti d’avant-garde substitutiste, pour penser le parti, son
action, son évolution, sa politique comme participant de la
perspective de l’émancipation des travailleurs par
eux-mêmes, le parti comme processus d’anto-organisation des
exploités. Cette idée est contenue dans la construction du
NPA conçue comme un processus mais ce processus n’a aucun
automatisme. Il appartient aux acteurs mêmes du processus de
le penser pour définir clairement son but et son contenu,
d’une certaine façon, c’est cela le marxisme : le mouvement
n’est pas tout, il doit se penser lui-même, devenir
conscient de ses buts et moyens, s’organiser…
Les marxistes agissent au cœur
même de ce processus, armer le NPA en se réappropriant
eux-mêmes le matérialisme militant c’est d’abord et avant
tout contribuer à faire vivre la démocratie par nos
propres initiatives.
Aujourd’hui,
plusieurs courants informels se retrouvent au sein du NPA,
un courant plus antilibéral qu’anticapitaliste, un courant
issu de l’écologie politique, un courant de sensibilité
anarcho-syndicaliste, un courant divisé entre diverses
sensibilités issues des vielles organisations trotskystes…
Ces tendances ne sont, dans la grande majorité, pas
constituées. Le courant marxiste sera utile au développement
du NPA s’il est à même de jouer un rôle démocratique et
révolutionnaire c'est-à-dire de faire vivre le débat pour
fédérer, unifier, homogénéiser le parti en contribuant à
l’élaboration d’une conception globale qui refonde la
perspective du socialisme et du communisme. Notre rôle n’est
pas de ressasser de vieilles formules ou de les disséquer à
l’infini, mais bien de donner un contenu, une perspective
commune aux révoltes engendrées par la crise des classes
dominantes.
Nous avons un défi à relever,
être le courant d’idées le plus ouvert, le plus
démocratique, le plus responsable à l’égard de l’ensemble
du parti tout en étant le plus influent parce que le plus
efficace pour la défense de nos perspectives communes.
Yvan
Lemaitre