Etre en phase avec les exigences des indignés, des exclus, des travailleurs…
« Nous voulons dans cette campagne être les
porte-parole des luttes des salariéEs, des précaires,
des jeunes... Nous faire l’écho des révolutions dans les
pays arabes pour montrer que seule l’intervention directe des travailleurs
et des peuples peut - par des grèves et des luttes
collectives - changer le rapport de forces, refuser ce
système et le renverser » est-il écrit dans la motion majoritaire votée lors du dernier Conseil politique national du NPA définissant notre
démarche
par rapport à la présidentielle et aux élections
législatives de 2012.
La courte motion dont sont tirées ces quelques lignes fait le constat qu’une
candidature de rassemblement anticapitaliste qui ne soit pas issue de nos rangs n’est,
aujourd’hui, pas possible, et, en
conséquence décide
de
présenter une ou un candidatE du NPA seulE à même aujourd’hui de défendre cette perspective.
Une conférence
nationale les 25 et 26 juin désignera notre candidatE et ouvrira la discussion sur le contenu et les axes de notre
campagne.
Cette motion
apparaît à la grande majorité des camarades comme un pas
en avant important, la fin des tergiversations
et des hésitations, la possibilité de regrouper tout
le parti pour reprendre l’initiative, mettre le NPA en phase avec
l’évolution de la situation sociale et politique,
regarder avec confiance la suite plutôt que
d’hésiter, douter, se
focaliser sur des discussions sans suite possible avec le Front de gauche.
Les nouvelles
d’Espagne sont venues souligner la nécessité de la clarification qui s’opère, l’urgence de l’approfondir, de lui
donner un contenu pratique et militant.
L’irruption de la jeunesse espagnole sur le terrain politique, dans la
rue, la veille même des élections municipales et régionales qui ont vu la déroute du PS et le succès de
la droite,
oblige les révolutionnaires à s’approprier les
données de la nouvelle situation en train de se
développer.
La fierté de la jeunesse espagnole est d’avoir eu l’audace, l’impertinence,
la liberté de braver le calendrier et la routine
institutionnels, de défier le pouvoir pour affirmer avec une calme détermination, « sans peur », ses idées, ses aspirations, ses exigences. Zapatero
s’est payé le ridicule de vouloir interdire la jeunesse, il a eu sa réponse, « gauche, droite,
la même merde ! »…
Dans la continuité des mouvements qui ont secoué l’Europe, de la grève
générale du
29 septembre en Espagne
sabotée par les directions syndicales, sous l’influence des révolutions arabes, les jeunes rejettent les inacceptables privilèges
des classes dominantes et de leurs serviteurs
politiques, posent la question des conditions de vie pour toute la
population, salaires, logement, travail,
solidarité, cadre de vie, écologie…, et
demandent
« la démocratie
réelle, maintenant ».Sous leurs multiplesformes
d’expression, leurs exigences posent la question du
pouvoir, qui dirige au service de quels intérêts ?
Cette vague de
contestation rejetant la mécanique truquée des élections
commence
à donner à
l’abstentionnisme un contenu politique radical
et indique sans ambiguïté le chemin pour les
révolutionnaires. Elle vient,
alors que bien des commentateurs
voudraient voir dans les difficultés
actuelles du NPA sa marginalisation,
donner son actualité à
notre projet,
son sens et son avenir.
Nous sommes les seuls à pouvoir donnerune expression politique, y compris sur le terrain
électoral, à cette contestation des classes dominantes, de
leurs institutions comme de leur personnel politique de
droite ou de gauche.
Nos difficultés, notre crise résultent de nos hésitations à choisir entre
le passé et l’avenir, entre les recompositions à gauche de
la gauche et la voie de l’anticapitalisme, de la
transformation révolutionnaire de la société. La jeunesse
nous
impose de choisir si, du moins, nous voulons lui être
utiles, si nous voulons contribuer à l’approfondissement des politisations en
cours en participant pleinement et sans préjugés aux
débats qui l’animent. Loin de donner des leçons,
d’avancer des idées toutes
faites,
c’est à partir de l’expérience politique
collective et pratique que nous pourrons aider
à l’émergence d’une nouvelle conscience de
classe démocratique et révolutionnaire. Notre
parti ne se construit pas d’en haut mais au
cœur même des mobilisations,
loin de tout dogmatisme et préjugés en étant capable d’apprendre, de tout repenser au regard des évolutions.
S’il ne craint pas d’intervenir
sur le terrain institutionnel,
électoral, s’il est prêt à
toutes les confrontations et les
alliances, il préserve en permanence son indépendance politique des
partis qui pensent que ce
n’est que par le canal
institutionnel et
parlementaire que l’on pourra
changer les choses.
C’est bien pourquoi il est quelque peu dérisoire de prétendre aujourd’hui
vouloir continuer
les discussions en particulier, voire principalement,
avec le Front de gauche en vue d’une candidature
unitaire anticapitaliste comme le dit la motion
minoritaire au dernier CPN. Dérisoire aussi de prétendre
lancer une candidature du NPA tout en se
disant prêt à la retirer
Quel sens peut prendre une telle proposition quand tout le monde sait
qu’il n’y a pas de candidature unitaire anticapitaliste
possible, si ce n’est un signe d’impuissance ?
Le document orientation-construction que la position
1 a défendu ensemble lors du congrès était clair : « Le Front de gauche(…) signifie la cristallisation dans le paysage
politique d’une gauche réformiste antilibérale qui n’a
pas coupé les ponts avec le social-libéralisme et qui
entend dans le même temps disputer
aux anticapitalistes l’espace de la radicalité. Les
dirigeants du Front de gauche voient la transformation
sociale pour l’essentiel par le prisme électoral et
institutionnel. Cette stratégie est concentrée dans la
formule fréquemment employée par Jean-Luc
Mélenchon, la « révolution par les urnes » ou « la
révolution citoyenne », et constitue la base de
l’accord entre le PCF et le PG sur le fond. […] Cette stratégie n’est pas la nôtre… ». Et confondre une politique de regroupement des anticapitalistes qui
est au cœur du projet du NPA avec une politique de front
social et politique permanent,
de bloc de gauche
avec les antilibéraux, relève d’une grande confusion.
La conférence de juin aura pour tâche de clarifier les choses, de confirmer et d’approfondir l’orientation
adoptée
lors du dernier CPN pour que notre parti se
donne les moyens de se mobiliser en surmontant les divergences, de se
rassembler autour de notre socle commun,
« de se retrouver
[…] sur une identité collectivement réappropriée » pour reprendre
la formule d’Olivier
Besancenot. Les enjeux sont d’importance, surmonter la crise du NPA,
saisir l’occasion de reprendre l’offensive pour pouvoir
discuter avec confiance des nécessaires
débats stratégiques.
La décision d’Olivier
Besancenot
de ne pas
être candidat participe de cette crise, elle en est une manifestation. Elle sème aussi par les justifications
politiques
qui lui ont été données
bien des idées fausses. Elle
est une façon par trop
personnelle de lutter contre…
la personnalisation et met le parti en
difficulté.
Mais c’est
ainsi et, en même temps, elle accentue les contradictions que le rôle
médiatique
d’Olivier contribuait
à
masquer ou à
étouffer
par sa
capacité à rassembler
des histoires
différentes
par delà les divergences d’appréciation politique. De ce point de vue, autant que les choses soient
claires et se
disent,
même si tout
cela aurait pu
se discuter
plus
collectivement
et plus
respectueusement
des militantEs
du parti.
Et ce
qu’Olivier
réussissait à
faire de par
sa position
médiatique, nous devons être capables de le faire grâce à la démocratie, au débat pour,
ensemble,
construire une
solidarité
militante.
La conférence de juin et les AG préparatoires en sont l'occasion à condition que nous soyons capables de rompre avec les tergiversations
qui, durant les mois passés, ont déboussolé notre parti, l’occasion de regarder vers l’avenir pour
nous approprier l’audace de la jeunesse
espagnole, oser affirmer nos
idées,
nos orientations, assumer les ruptures qu’elles peuvent impliquer,
débattre, confronter, faire vivre la démocratie
partout où nous intervenons.
Nous voulons
contribuer à construire l'unité pour les mobilisations, agir et influencer dans les cadres unitaires ainsi que dans les débats politiques avec toute la
gauche mais dans
la clarté, en pleine indépendance des
cogestionnaires du système. Le moment est
venu de reprendre confiance en nous,
de dépasser les clivages de tendances
en approfondissant le débat politique,
en nous regroupant à travers les
campagnes, à
travers nos interventions
dans le monde du travail et la
jeunesse, en nous donnant les moyens de défendre notre projet de rassemblement des
anticapitalistes pour être, dans
la campagne de la présidentielle et des législatives
de 2012
comme dans notre
activité quotidienne, les
porte-parole du monde du travail, de la jeunesse, des exclus, de
leurs
exigences.
Nous ne ferons
pas les frais
de leur crise !
Yvan Lemaitre