Unir le NPA pour rassembler les anticapitalistes
Sans
surprise, la conférence nationale du Parti communiste a
choisi Jean-Luc Mélenchon dimanche dernier comme candidat
pour 2012. Au PG, la candidature à la présidentielle, au
PCF, l’écrasante majorité des circonscriptions aux
législatives, tel est « l’accord global » conclu entre les
différentes composantes du Front de Gauche. Symboliquement,
c’est une page qui se tourne puisque, pour la première fois
depuis 1974, la direction propose que le PC ne soit pas
représenté par un candidat issu de ses propres rangs.
Certes, Pierre Laurent,
secrétaire national du PCF, qui soutient la candidature de
Jean-Luc Mélenchon, a du se résoudre à proposer plusieurs
noms dont celui d’André Chassaigne au vote des militants qui
se prononceront les 16, 17 et 18 juin. « On a décidé
d'aller au bout de ce débat démocratique », a-t-il
expliqué, à défaut de pouvoir faire autrement, suscitant au
passage l’agacement de Jean-Luc Mélenchon : « Si on me
veut, qu'on le dise clairement, oui ou non, mais allons y,
avec le cœur ! ».
C’est que la perspective de
voir le PCF représenté par un ex-dirigeant du PS passe mal
dans une partie de l’appareil qui voudrait aussi limiter au
maximum les exigences du PG en terme de législatives. Et,
pour nombre de militants, la candidature de Mélenchon sonne
comme un constat de faillite, un abandon.
Quoi
qu’il en soit, le vote des militants ne départagera pas des
orientations différentes : il n’y a nulle divergence de fond
entre les différents candidats, tous regroupés autour de la
perspective de créer une « nouvelle majorité de gauche
dont le pays a besoin » sur la base d’un « programme
de transformation, ce qui implique de faire bouger toute
la gauche dans cette direction », comme l’indique la
résolution adoptée le week-end dernier.
« Faire
bouger toute la gauche », la formule invalide d’avance
les prétentions à changer le sort des classes populaires,
des travailleurs, de la jeunesse. S’il faut encore s’en
convaincre, il n’y a qu’à lire le programme du PS adopté à
l’unanimité par sa conférence ou voir le soutien appuyé des
dirigeants socialistes à la candidature de Lagarde pour le
poste de directeur du FMI pour savoir que la politique menée
par un éventuel futur gouvernement de gauche sera dictée par
les marchés. Le PS n’a pas d’autre politique que la droite,
une politique au service du patronat et des grands groupes
financiers.
Prisonniers
de leur démarche institutionnelle, les partis antilibéraux
n’ont en réalité d’autre perspective que de resservir le
plat refroidi de l’Union de la Gauche des années Mitterrand
ou de la Gauche plurielle de Jospin… à condition que le PS y
trouve bien sûr un intérêt, mais rien n’est moins sûr.
Il
n’y a rien à attendre de 2012. Notre avenir ne se joue ni
sur le terrain électoral, ni sur le terrain parlementaire
mais dans les entreprises, les quartiers, sur le terrain des
mobilisations sociales, loin des rouages bien huilés des
institutions. C’est ce qui nous distingue des forces
antilibérales.
Il
est à ce propos pour le moins inquiétant de constater que le
NPA peine à trancher sa tactique électorale pour 2012 et que
les débats préparatoires à la conférence nationale des 25 et
26 juin suscitent autant de tensions sur la question de
savoir s’il faut ou non poursuivre des discussions avec les
forces antilibérales, à commencer par celles du Front de
Gauche, dans la perspective d’une candidature commune,
perspective que toutes les positions en débat savent
impossible.
A
l’encontre de la position majoritaire qui acte
l’impossibilité d’une alliance sur le terrain électoral avec
les forces antilibérales, la minorité de la direction
(l’ex-position 3 et une minorité de la position 1), qui se
retrouve sur le texte B, évoque, dans une tribune publiée
dans Tout est à Nous ! : « le sacrifice durable
de tout profil de rassemblement anticapitaliste large »,
une « rupture avec le projet de fondation du NPA »,
un« enfermement identitaire », tout en
reconnaissant… qu’une candidature du NPA est bien nécessaire
mais que le NPA doit indiquer qu’il serait prêt à la retirer
pour peu que les conditions d’un rassemblement soient
réunies.
Il
est pour le moins surréaliste d’accuser des camarades de
rompre avec le projet du NPA pour la seule raison qu’ils
actent un constat politique que tout le monde partage,
surréaliste aussi de cliver le parti au nom d’une unité que
chacun sait impossible, sauf à minimiser nos désaccords
programmatiques et stratégiques avec les antilibéraux,
brouiller les cartes… et contredire nos principes
fondateurs.
Le
caractère national des échéances électorales de 2012,
présidentielle et législatives, oblige le parti à clarifier
les politiques à géométrie variable menée lors des élections
régionales et cantonales.
S’il
faut espérer que la conférence nationale du NPA parvienne à
regrouper le parti autour d’un(e) ou candidat(e), un
travailleur ou une travailleuse associée à aux luttes, porte
parole des préoccupations et de la révolte des salariés, des
chômeurs, des précaires et des jeunes, il est évident que
les débats en cours, la crise politique que traverse le NPA,
appellent à une refondation du parti.
Assumer
notre propre identité, notre propre programme,
indépendamment des antilibéraux et du calendrier électoral,
pour porter les exigences du monde du travail et de la
jeunesse est la seule manière de regrouper non seulement les
militants qui rejettent la perspective, hypothétique, d’une
nouvelle mouture de la gauche plurielle mais aussi les
travailleurs, la jeunesse, qui savent que leur sort dépend
entièrement de leur capacité à se mobiliser quel que soit le
gouvernement qui sortira des urnes. La seule manière de
regrouper autour d’un programme anticapitaliste contestant à
la bourgeoisie sa mainmise sur l’économie et posant la
question du pouvoir, d’un gouvernement démocratique des
travailleurs capable de mettre en œuvre une politique
favorable aux classes populaires, de garantir leur contrôle
sur la marche de la société pour en finir avec la dictature
de la finance.
C’est
cette démarche qui est au cœur du projet et du programme du
NPA, qui a permis non seulement le regroupement de
différents courants révolutionnaires en son sein mais aussi
de trouver une base plus large. C’est cette démarche qu’il
nous faut poursuivre, approfondir, renforcer.
Raymond Adams