Les divisions au sein du NPA et le nécessaire détour par la stratégie
L’université d’été du NPA a
été l’occasion de poursuivre la discussion sur les questions
de stratégie, une discussion qui se cherche et rencontre
quelques difficultés à prendre un contenu pratique et militant
en prise avec la crise du NPA et les voies et moyens de la
dépasser, en un mot les préoccupations de la grande majorité
des camarades. Cette discussion ne sera féconde que si nous en
définissons clairement les objectifs, les points autour
desquels elle devrait ou pourrait se concentrer, et surtout si
elle se sort du piège dans lequel elle semble s’enfermer,
d’une justification à posteriori des choix tactiques des uns
et des autres.
Le premier objectif de ce
débat est bien de se dégager de la logique de certains
comportements fractionnels qui surinterprètent les désaccords
pour les besoins de leur cause, sans débattre du fond, mais
pour mieux accuser l'autre de... Les désaccords tactiques
deviennent des désaccords stratégiques… Nous dégager de cette
situation ridicule où tout le monde pense qu'il faut un
candidat du NPA à la présidentielle, que rien d'autre n'est
possible, que cela est souhaitable et nécessaire, mais où,
cependant, non seulement nous n'avons pas encore réussi à
regrouper le parti autour de son propre candidat pour défendre
ses propres orientations mais nous nous divisons sur des
questions de « profil » ! Comment une telle aberration
est-elle possible ? Quelle confusion des esprits peut-elle
l’expliquer ?
Je crois que le diagnostic est
en fait assez simple, celui d’une grande difficulté à penser
notre politique de regroupement des anticapitalistes en lien
avec nos objectifs stratégiques, à donner sa dimension
stratégique à notre projet, à ne pas être dominé par
l’instant, par les choix tactiques pour être en mesure de
garder le cap. La thérapeutique en découle : à partir de notre
socle commun, les principes fondateurs, définir notre
stratégie en précisant les différentes compréhensions que nous
pouvons en avoir, les conséquences pratiques et immédiates de
ces différences au lieu de faire l’inverse. Ce socle commun
implique une solidarité de parti, cette solidarité qui, mieux
que les discours, convainc que l'on se bat pour la même chose,
que l'on discute de la même chose. C’est ainsi et dans ce
cadre que se conjuguent cette discussion, la campagne autour
de Philippe Poutou et l’objectif de refondation de notre
parti.
Plus précisément, nous donner
maintenant les moyens d’être présents dans la campagne sera
une première étape sur le chemin de cette refondation pour peu
que nous ayons commencé à construire quelques solides piliers
sur lesquels prendre appui. Cette perspective définit
l’objectif de nos discussions stratégiques, leur donne leur
sens.
Un parti pour la
transformation révolutionnaire de la société
Lors du congrès fondateur, une
discussion avait eu lieu à propos de la dénomination du parti
sur le sens de la formule « parti pour la transformation
révolutionnaire de la société ». Cette formule, en fait
claire, a été acceptée comme un compromis entre ceux qui ne
voulaient pas que le parti se dise révolutionnaire et ceux qui
le voulaient. Les premiers voyaient le NPA comme un mouvement
large, ouvert, unitaire, pluraliste destiné à peser dans les
recompositions à gauche de la gauche en s’y intégrant et les
seconds restaient dans le cadre de raisonnement
d’autoaffirmation révolutionnaire. Ce compromis avait été
remis en cause lors du vote sur la question du nom, NPA ou
Parti anticapitaliste révolutionnaire.
Les termes mêmes de ce débat
contenaient en germe la crise à laquelle nous sommes
confrontés aujourd’hui. La question était posée en termes de
formule, pas de contenu, la divergence stratégique implicite
n’était pas pleinement assumée, ni formulée.
En fait, il était juste de
définir le NPA comme parti de transformation révolutionnaire,
un parti large et ouvert, bien sûr, mais un parti des
travailleurs, parti des luttes de classe, ayant sa propre
stratégie dans la perspective de la transformation
révolutionnaire de la société, stratégie autonome et
indépendante de celle des antilibéraux.
Voilà l’essentiel, ce qui
devrait être le point commun de départ de nos discussions, ce
qui définit notre projet. Et que certains camarades ne
semblent pas assumer.
Si l’on accepte ces prémisses
comme base de départ du débat stratégique, les choses
devraient se clarifier facilement ou du moins les points de
litiges éventuels ne devraient pas avoir d’implications trop
fortes. Nous devrions maîtriser les divergences qui se sont
développées dans l’espace laissé libre lors du congrès
fondateur du fait des non-dits. Le premier congrès n’a pas pu
aborder ces questions pour lever les ambiguïtés, au contraire
les incompréhensions sont devenues des divergences qui tendent
à s'approfondir. Il y a maintenant urgence à clarifier les
choses pour définir sans ambiguïté l’axe stratégique qui
détermine notre politique et notre tactique, une vision
stratégique claire qui permette d’avoir une boussole pour ne
pas perdre le Nord à travers les courants et les vents des
luttes de classes...
Discuter des questions que
nous pouvons résoudre
L’objectif de notre discussion
ne porte pas tant sur la façon dont on peut aujourd’hui penser
la transformation révolutionnaire de la société que sur notre
stratégie pour la construction d’un parti, l’instrument de
cette transformation révolutionnaire de la société. Les deux
questions sont directement liées, elles ne sont cependant pas
identiques. Ce lien entre les deux s'écrit à travers le
programme, la démarche transitoire qui s’articule autour de la
question de la conquête du pouvoir.
La discussion sur le processus
révolutionnaire lui-même se concentre au stade actuel,
essentiellement, mise à part la nécessaire étude de l'histoire
du mouvement ouvrier et des révolutions passées, sur
l’actualité du projet révolutionnaire, ce qui le rend
nécessaire et possible.
Cette discussion est
extrêmement importante, elle nous est de fait imposée par les
longues années d’échecs et de reculs qui ont discrédité le
projet lui-même ou, au mieux, l'ont classé au rayon des
utopies. Réhabiliter en quelque sorte notre projet, c'est
décrire les contradictions à l'œuvre qui le nourrissent dans
les flancs même de la société capitaliste, le mûrissement des
conditions objectives qui rendent nécessaire et possible un
processus de révolution permanente pour construire à l’échelle
mondiale le socialisme. Sans doute n’y avons-nous pas consacré
suffisamment de temps, mais ce n’est pas, je crois, le débat
prioritaire aujourd’hui. Ou du moins nous devons dans
l'immédiat l’aborder sous un angle plus pragmatique, concret
et militant, celui des termes dans lesquels se pose
aujourd’hui la construction d’un parti pour la transformation
révolutionnaire de la société. En quoi les évolutions
objectives et subjectives peuvent-elles nous conduire à penser
que nous pouvons réussir là où, hier, nous avons échoué ? A
quelles conditions ? Ces transformations objectives ne nous
imposent-elles pas aussi de bouleverser nos propres
conceptions, nos propres raisonnements ?
Un parti pour
l'émancipation des travailleurs par eux-mêmes
Le débat que nous avons n’est
pas un débat propre au NPA, il n’est en rien autocentré ni
narcissique, autant il est vrai que notre propre crise
participe d’une crise bien plus globale du mouvement ouvrier,
et, de ce point de vue, il concerne l’ensemble des militants
qui luttent pour l’émancipation humaine. La difficulté du NPA
à s’affirmer, à se penser lui-même en parti, cette difficulté
à nous forger une compréhension commune de la période, des
tâches, de la portée de notre propre projet exprime, quant au
fond, un problème posé au mouvement anticapitaliste et
révolutionnaire depuis près de vingt ans, c’est à dire depuis
l’effondrement de l’ex-URSS : l’extrême gauche, pour
l’essentiel le mouvement trotskyste, n’a pas réussi à répondre
aux nouvelles possibilités ni aux nouveaux besoins nés de la
fin du stalinisme et de la transformation de la
social-démocratie en social-libéralisme. Nous n’avons pas
encore réussi à opérer notre révolution culturelle, un saut
qualitatif de groupes opposants à la social-démocratie et au
stalinisme à ne serait-ce que l'ébauche d'un parti ouvrier et
populaire, que ce soit Lutte ouvrière et l’appel à un parti
des travailleurs après 1995, Voix des travailleurs et la
politique d’unité des révolutionnaires de 1997 à 2000, la LCR
avec la fondation du NPA, aujourd’hui le NPA lui-même.
Notre crise et notre
discussion s’inscrivent dans cette difficulté générale du
mouvement révolutionnaire, qui n’est pas une spécificité
hexagonale loin s'en faut mais bien l’expression de la
contradiction entre l’ancien et le moderne, le vieux et le
nouveau. Elle est la conséquence d’une rupture historique
ouverte par l’effondrement du stalinisme, le basculement du
monde qui débouche sur une crise globale sans précédent, une
rupture qui crée aussi les conditions objectives de cette mue,
l’exige et la rend possible.
Mais cette mue ne se fera pas
automatiquement, elle suppose une remise en question, un bilan
critique des conceptions héritées de la période antérieure
depuis 1968, en particulier les conceptions de construction du
parti conçu essentiellement comme un travail volontariste, par
en haut, d’autoconstruction dans laquelle le programme est
plus un instrument de délimitation, de clivage, de formules
dogmatiques, qu’un instrument d’intervention et de
regroupement. Cette conception a été façonnée par des années
de lutte contre le stalinisme et de recul, à l'aide d'une
compréhension déformée du bolchevisme dans le cadre de cette
lutte.
Marx, dans le Manifeste,
en réponse aux conceptions des premiers groupes communistes ou
ouvriers d'avant 1848, parle de la classe ouvrière qui se
constitue en parti. Certes la formule apparaît aujourd’hui
bien abstraite mais elle indique cependant un élément
essentiel : comprendre le parti comme un processus
d’auto-organisation auquel participent groupes, tendances, un
processus créateur qui suscite initiatives, émulation,
rivalités et luttes d’influence aussi, un processus solidaire,
cimenté par une même conscience révolutionnaire, socialiste et
de classe.
Ce processus est un melting
pot à travers lequel le parti lui-même, un parti creuset en
quelque sorte, se transforme, évolue, se renforce, élabore sa
politique à travers une confrontation politique permanente
tant entre les différents courants qui s’y retrouvent qu’avec
les autres forces politiques du mouvement ouvrier, qu’avec les
travailleurs eux-mêmes. Un processus organisé, actif qui se
donne les moyens de peser dans les luttes sociales et
politiques. Un processus ouvert et démocratique qui se nourrit
des besoins et aspirations des travailleurs et des classes
populaires bien plus que de l'impératif catégorique des
formules révolutionnaristes...
Une stratégie définie par
la période
La situation objective rend
stériles les vieilles conceptions qui ont su dans le passé
préserver une certaine continuité du mouvement et du programme
révolutionnaire. La fin du stalinisme et les bouleversements
en cours ouvrent de nouveaux espaces pour les mobilisations et
les luttes, de nouveaux horizons insoupçonnés pour les
révolutionnaires. La compréhension de ces bouleversements, de
leurs conséquences est ce qui, en premier lieu, définit notre
stratégie, d'elle résulte notre compréhension des tâches. Il
ne s’agit pas de discuter sans fin des leçons du passé mais
bien de comprendre le présent pour agir. Les trois grandes
caractéristiques qui déterminent aujourd'hui cette nouvelle
période convergent pour créer les conditions objectives de la
naissance de nouveaux partis ouvriers et populaires :
a) La crise globale du
capitalisme a atteint un stade de non retour. Les expédients
des classes dominantes ont renforcé les contradictions à
l’œuvre au point qu’une catastrophe financière est imminente,
annoncée, qu'elle est inévitable du fait de l'exacerbation des
contradictions entre la masse croissante de capitaux en quête
de nouveaux profits, l'atonie de la production et la
détérioration des conditions d'existence du plus grand nombre.
Il n'y a pas d'autre issue capitaliste à plus ou moins court
terme qu'une purge, la destruction massive de ces capitaux
fictifs parasitaires et d'une partie de la dette par un krach
financier. La seule alternative renvoie à des mesures
d'urgence drastiques pour garantir les droits du monde du
travail, empêcher les financiers de nuire en refusant de payer
et de rembourser la dette, la nationalisation des banques en
un seul organisme de crédit sous le contrôle de la population.
La crise écologique redonne toute sa pertinence à la nécessité
d'une planification démocratique de la production et des
échanges à l'échelle de la planète.
Dans le même temps, le
principal facteur de stabilité des vieilles bourgeoisies
impérialistes, les surprofits impérialistes résultats du
pillages des peuples, est sapé par une terrible concurrence
internationale avec son corollaire, la mise en concurrence des
travailleurs à l’échelle internationale. Une nouvelle classe
ouvrière émerge de la mondialisation libérale et impérialiste
qui, à travers de multiples combats et mobilisations,
s'affirme comme acteur politique, acquiert une conscience de
classe, s'organise, à travers ce mouvement moléculaire qui
tend à s'accélérer, se construit comme une nouvelle classe
ouvrière internationale porteuse de la transformation
révolutionnaire de la société.
b) La question sociale
s'impose comme la question politique-clé en lien avec la
question de la démocratie. Avec la discussion sur les moyens
de sortir de la crise, elles sont au cœur du débat public.
Dans le même temps, l’État apparaît de plus en plus aux yeux
des plus larges masses comme un instrument sous la tutelle des
banques et de la finance, subordonné à la défense de leurs
intérêts.
Différents éléments convergent
pour aider à la naissance d’une nouvelle conscience de classe
révolutionnaire parmi une fraction non négligeable du monde du
travail et de la jeunesse, ce qui n’a jamais eu lieu dans les
vieilles puissances impérialistes occidentales depuis la fin
de la deuxième guerre mondiale même au moment des sales
guerres coloniales. L’évolution est d’autant plus profonde
qu’elle touche tous les pays d’Europe mais aussi les USA.
« Non à l'austérité »,
« refusons de payer leur dette », « aux peuples de
décider », deviennent des mots d'ordre universels.
c) La vague révolutionnaire
qui balaye le monde arabe souligne le fait que les conditions
objectives d’une nouvelle période révolutionnaire existent.
C'est bien dans ce cadre-là que nous devons raisonner. Le fond
est bien de mettre ces révolutions en perspective, de les
inscrire dans une évolution globale du monde qui fonde et
légitime une stratégie révolutionnaire. Comme il était dit, au
moment du congrès, dans l’introduction du texte d’orientation
de la position 1 en rappelant les principes fondateurs, les
évolutions démocratiques et progressistes ne pourront venir
que d’en bas, de l’intervention des classes exploitées et
opprimées. Les bouleversements opérés par la mondialisation
libérale et impérialiste ont mûri les conditions objectives
pour une transformation révolutionnaire de la société en
mettant en concurrence les travailleurs à l’échelle de la
planète, en prolétarisant des millions de paysans, en ouvrant
les frontières, en développant comme jamais les relations
internationales, les transports, les nouvelles technologies.
En portant les contradictions même du capitalisme à un niveau
d’exacerbation jamais atteint au point que le décalage entre
les progrès scientifiques, techniques et la dégradation
sociale pour le plus grand nombre, le creusement des
inégalités, la paupérisation sont devenues insoutenables. Ce
sont ces contradictions qui ont engendré la première vague
révolutionnaire de la nouvelle période.
Un mouvement irréversible est
engagé, il connaîtra des hauts et des bas, des victoires et
des défaites, de lentes accumulations de forces puis de
brusques accélérations, des explosions mais notre stratégie
doit toute entière s’inscrire dans cette nouvelle période de
révolution en permanence.
Un programme pour les
luttes, un programme de gouvernement
Nous héritons de toute la
longue période où la classe ouvrière n’est pas intervenue pour
son propre compte en postulant à la direction de la société
d’une grande difficulté à construire le lien concret et
pratique entre la lutte pour le pouvoir demain et notre
activité quotidienne, les luttes d’aujourd’hui. La difficulté
est bien réelle, dans les rapports de force, les niveaux de
conscience, notre propre expérience collective… D’une certaine
façon, nous restons dominés par l’idée du grand soir ou... son
rejet.
Notre difficulté à penser ce
lien entre lutte pour le pouvoir et lutte quotidienne laisse
le champ libre soit au révolutionnarisme de la phrase soit au
pragmatisme opportuniste. La politique a horreur du vide et à
défaut d’être capable collectivement d’élaborer, de formuler
au quotidien une politique qui s’inscrit dans la lutte pour
conquérir des positions politiques sur la base de notre propre
orientation, chacun recherche une issue soit dans
l’affirmation des principes soit dans l’adaptation au rapport
de force existant. Il nous faut nous atteler collectivement à
la tâche de construire ce lien entre le pragmatisme de la
lutte quotidienne et la stratégie révolutionnaire.
La révolution n’est pas un
saut qualitatif à partir de rien mais bien un bouleversement,
une rupture, conséquence de l’accumulation de contre-pouvoirs
locaux gagnés dans les syndicats, les associations, les
institutions elles-mêmes. L’agitation,
l’activité révolutionnaire n’est pas une simple incantation
mais la lutte pied à pied pour gagner des positions, la lutte
pour des micropouvoirs démocratiques et révolutionnaires,
accumulation primitive de forces révolutionnaires, de
matériels explosifs en vue de la conquête du pouvoir.
Construire ce lien dans la
pratique quotidienne suppose de le construire dans nos textes
programmatiques. C'est le sens même de la démarche transitoire
qui définit ce lien entre les exigences quotidiennes et la
question du pouvoir en disant clairement et sans ambiguïté
l’enjeu de notre combat. Cette démarche repose sur une
compréhension du rôle des travailleurs, de la nécessité de
leur organisation pour intervenir en tant que classe sur le
terrain politique. Notre politique n'est pas celle du tout ou
rien, elle vise à des conquêtes partielles, défend les acquis.
Cela veut dire concrètement la lutte pour conquérir
démocratiquement des positions sur la base de nos orientations
syndicales et revendicatives mais aussi politiques y compris
dans les institutions bourgeoises. Nous sommes sans tabous ni
préjugés, nous pouvons aller partout à condition d'avoir la
force collective de préserver notre indépendance politique,
les liens avec la classe ouvrière et d'être les acteurs de son
organisation démocratique.
Renaissance du marxisme, un
long fleuve agité…
On le voit, cette discussion
sur la stratégie renvoie à un vaste travail d'élaboration
collective, politique, théorique et pratique en lien avec le
développement de notre intervention dans la lutte de classe,
dans ses manifestations y compris les plus quotidiennes. Il
participe d'une véritable renaissance du marxisme en tant que
théorie des luttes d’émancipation, la mise au service du
combat pour la démocratie et la liberté, pour le socialisme,
des connaissances modernes au moyen des conceptions
matérialistes de l'histoire et de l'évolution. Renouer avec
une tradition marxiste clairement dégagée des caricatures
totalitaires du stalinisme ou du maoïsme, dégagé aussi de nos
propres déformations, est la seule méthode pour nous donner
l'outil nécessaire pour étayer, argumenter notre perspective
stratégique, construire le lien entre pratique et théorie,
faire en sorte que notre parti devienne réellement un
instrument au service des travailleurs.
Cette méthode a pour condition
même la plus large démocratie, une pleine liberté de
discussion, d'élaboration. Il s'agit de bien plus que la
démocratie formelle des tendances et fractions où chacun lutte
pour ses propres positions au prix souvent d’une paralysie du
parti. Il s'agit d'une réelle démocratie révolutionnaire
soucieuse d’associer tout le monde, de débattre de tout,
d’encourager les initiatives, force dynamique qui fonde la
confiance et la solidarité de parti. C’est cette démocratie
vivante qui permet dans la pratique de construire, pas à pas,
le lien entre le travail quotidien, la tactique et la
stratégie révolutionnaire. C'est aussi à travers une telle
démocratie que peut s'éduquer, se sélectionner, se qualifier
une réelle direction en symbiose avec l'ensemble du parti.
Tout ça ne se fera pas en un
jour, ni par un vote, mais demande du temps, du travail, un
engagement militant profond. Commencer ce travail signifie
d'abord surmonter la crise que nous traversons et nécessite
une certaine capacité d’autocritique. Ce ne sont pas le
projet, ni les textes principaux qui le définissent qui sont
en cause mais bien nos capacités individuelles et collectives
à les assumer, à leur donner un contenu pratique, dynamique,
militant au sein du monde du travail et de la jeunesse. Cette
capacité ne dépend pas tant de qualités morales,
individuelles, mais bien plus de notre capacité à engager
notre discussion sur la stratégie, la compréhension de la
nouvelle période, les tâches qui en résultent, les changements
qu’elle implique. Un vaste et passionnant travail en lien avec
notre travail quotidien, notre campagne, le développement et
le renforcement de notre parti...
Yvan
Lemaitre