Une campagne au cœur de la crise politique pour défendre les intérêts du monde du travail
« Un
parfum de Fin de règne » titre Le Point de
cette semaine alors que le Nouvel Obs lui fait écho
« Les dessous d'une fin de règne » et que Marianne
se veut plus provocatrice, « Le boulet ». Tous sont
d'accord pour annoncer la fin de Sarkozy en bien mauvaise
posture au point que dans son propre camp certains
s’interrogent à haute voix sur sa capacité à les
représenter. Juppé, certes avec retenue, pose déjà au
recours possible... François Fillon se déclare favorable à
des primaires à droite, « un processus moderne qui
convient à droite comme à gauche »...
L'aggravation
de la crise, cette semaine avec le démantèlement de Dexia,
ruine les discours officiels dans le même temps que les
affaires remontent à la surface. Les principaux proches de
Sarkozy se trouvent compromis dans la « république des
valises » alors qu'éclate maintenant le scandale des
ripoux lyonnais soupçonnés de trafics de drogue... La
politique du fric roi secrète la corruption au sommet de
l’État. Les mêmes qui invoquent les déficits pour imposer
aux travailleurs et aux classes populaires d'inacceptables
sacrifices ne se contentent pas des largesses de l’État ou
de leurs maîtres...
Le
discrédit est tel que la droite vient même de perdre le
Sénat, une « victoire
historique » pour la gauche. Avec 177 sièges sur
348, elle a obtenu la majorité absolue. Le mode de
scrutin indirect et antidémocratique fait que ce vote
n'est qu'un reflet bien lointain et déformé du
mécontentement qui règne dans le pays. Il constitue
aussi les premiers pas d'une alliance de toute la
gauche, alliance qui s'est poursuivie pour l'élection du
président de la Haute assemblée. « Face à une droite
dépitée et désunie, les sénateurs socialistes,
communistes, radicaux de gauche, écologistes et divers
gauche ont élu, dès le premier tour, et pour la
première fois depuis 1958, un président de gauche à la
Haute Assemblée», jubile l'Humanité alors
que le PC a l'habitude de présenter son propre candidat
au premier tour. Jean-Pierre Bel, le
nouveau président socialiste, n'est pourtant pas un foudre
de guerre. « Je ne serai jamais là pour servir un
clan ; je veux toujours me tourner vers l’intérêt
collectif. » a-t-il
déclarésoucieux
de ménager la droite. Certes, pour Nicole
Borvo Cohen-Seat, présidente du groupe communiste,
républicain et citoyen (CRC), « ce rendez-vous doit
être l’occasion de remettre en cause la réforme des
collectivités locales votée par la droite et rejetée par
les élus locaux ». Son groupe se veut « garant
des changements à gauche » et se prononce « pour
une opposition claire à la politique du pouvoir ». Une
opposition claire qui commence par bien des compromis et
marchandages non seulement à gauche mais avec la droite pour
la répartition des postes et sinécures, présidences de
commission...
Jean
Luc Mélenchon bat les estrades pour défendre sa « révolution
citoyenne » pendant que, tranquillement, dans l'ambiance
feutrée du Sénat, les élus du Front de gauche négocient leur
place dans la nouvelle majorité...
Allons-nous
vers une victoire de la gauche et une nouvelle mouture de
l'union de la gauche débouchant sur une majorité
parlementaire et gouvernementale incluant le Front de
gauche ?
Nous
verrons, une telle hypothèse peut sembler cohérente dans la
logique de l'alternance mais rien ne dit que cette logique
ne soit pas bousculée par le Front national avec lequel une
partie de la droite souhaite ouvertement une alliance. Rien
ne dit non plus que l'alliance électorale pour les
sénatoriales entre toutes les forces de gauche, réalisée
loin des regards des classes populaires, résiste, pour la
présidentielle et les législatives de 2012, à la pression du
mécontentement. La concurrence électorale pourrait bien
faire voler en éclat les calculs des notables d'autant que
pour Mélenchon l'horizon n'est pas 2012. Ce n'est qu'une
étape pour achever son OPA sur le PC.
La
crise de la droite participe d'une crise politique globale,
la crise d'une démocratie parlementaire vidée de tout
contenu au profit de la dictature de l'aristocratie
financière. Nous avons devant nous une situation instable
qui pourra connaître de brusques changements. Nous verrons,
et jugerons étape par étape des méandres et aléas de la
politique des différentes composantes de la gauche. Du point
de vue des travailleurs et des classes populaires le
problème n'est pas là. Il est bien de trouver les armes pour
se défendre face à l'offensive des classes dominantes et de
leur État, d'apporter une issue à la crise du capitalisme.
Il est certain, ce n'est pas une hypothèse, que la politique
du PS sera, sur le fond, la même que celle de la droite,
comme elle l'est en Grèce ou au Portugal. Les débats des
primaires n'ont apporté aucune réponse claire aux questions
que se pose la population. Chaque postulant affiche son
contentement de soi, surfe sur l'antisarkozysme mais ne
s'engage à rien vis-à-vis des salariés et de la jeunesse.
Martine Aubry, dans un moment d'audace, a interpellé lors du
dernier débat François Hollande, « on ne pourra pas
battre une droite dure avec une gauche molle », mais
on aimerait bien savoir où est cette gauche dure !
A
travers l'évolution de la situation sociale et politique à
venir, l'essentiel est d'utiliser la campagne électorale
pour populariser la perspective portée par le NPA, celle
d'un nouveau parti des travailleurs défendant en toutes
circonstances les intérêts des classes exploitées, un parti
pleinement indépendant de la gauche libérale et des
combinaisons parlementaires. L'essentiel est de populariser
un programme politique portant les exigences immédiates des
salariés pour contrer l'offensive de classes dominantes,
programme qui ne pourra être mis en application que par un
gouvernement qui ose remettre en cause la propriété privée
de la finance. Nous soumettons ces idées et perspectives à
la discussion partout où cela nous est possible dans le même
temps que nous mobilisons toute nos forces pour que la
candidature de Philippe Poutou devienne une réalité, la
seule capable de bousculer les jeux politiciens.
Yvan Lemaitre